En cinquante ans, les mœurs ont évolué et le sens du mot « famille » a bien changé. La société va toujours plus vite que la loi et, en dépit des évolutions du droit et de la fiscalité pour s’adapter aux usages, la succession des familles recomposées demeure complexe et entraîne souvent des conflits.
Sans lien de parenté avec le défunt, les beaux-enfants n’ont aucun droit légal dans une succession.
Alors, quelles solutions existe-t-il pour faire bénéficier les enfants de son conjoint d’une part de son héritage ?
Que dit la loi concernant l’héritage pour les enfants du conjoint ?
Votre conjoint a des enfants issus d’une première union et que vous considérez comme vos propres enfants ? L’administration fiscale, elle, considère les beaux-parents comme des non-parents, donc comme des étrangers vis-à-vis des enfants nés d’une précédente union de leur conjoint.
Selon le droit, les enfants ne peuvent donc hériter de leur beau-parent que par testament, en étant taxés à 60 % après abattement de 1594 € !
Sans compter qu’en présence d’enfants nés d’un nouveau mariage, l’héritage des beaux-enfants est réduit à la quotité disponible (part du patrimoine dont le défunt peut disposer librement). La réserve héréditaire qui revient aux héritiers légaux (les enfants du défunt) doit toujours être respectée.
L’adoption pour rétablir l’égalité ?
Adopter les enfants de votre conjoint leur permet de devenir des héritiers légitimes. Ils bénéficient ainsi d’une part de succession à égalité avec les enfants biologiques, avec un abattement fiscal de 100 000 € sur les biens reçus. Ils ne deviennent héritiers légaux que de leur beau-parent, pas de leurs grands-parents adoptifs.
Dans le cadre d’une adoption simple, l’enfant conserve aussi ses liens avec sa famille d’origine et reste l’héritier de ses parents biologiques, contrairement à l’adoption plénière, où l’adopté acquiert une nouvelle filiation qui remplace celle d’origine et hérite de ses parents adoptifs.
L’adoption de l’enfant de son conjoint n’est possible que sous certaines conditions, et le tribunal judiciaire s’assurera de la sincérité de la démarche (les liens affectifs entre le beau-parent et l’enfant doivent être réels et non motivés uniquement par l’intérêt successoral).
Quelles sont les alternatives ?
Plusieurs solutions s’offrent au beau-parent qui souhaite transmettre un patrimoine aux enfants de son conjoint sans recourir à l’adoption.
Le démembrement de propriété (pour réduire les droits à payer)
La pleine propriété d’un bien se divise en deux parties : l’usufruit et la nue-propriété. La donation avec réserve d’usufruit permet au donateur de conserver le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les fruits (les loyers, par exemple). Il ne donne alors que la nue-propriété, c’est-à-dire les murs. Ainsi, la taxation ne se fait que sur la valeur transmise en nue-propriété en fonction de l’âge de l’usufruitier.
Au décès du beau-parent, l’enfant devient pleinement propriétaire sans taxation complémentaire.
La donation-partage du vivant
Il s’agit, de votre vivant, de partager votre patrimoine entre les enfants issus d’une première union et ceux que vous avez eus avec votre conjoint actuel. Toutefois, chaque conjoint ne peut donner qu’à ses enfants biologiques ou adoptés.
Ils bénéficient ainsi de l’abattement de 100 000 € renouvelable tous les 15 ans ainsi que du barème de transmission, réservés normalement à une transmission de parent à enfants (au lieu de beau-parent à enfants). La donation-partage présente aussi l’avantage de figer la valeur d’un bien donné au jour de la signature de l’acte, généralement plus basse qu’au jour du décès.
Si la donation-partage porte sur un bien commun au couple, seul est nécessaire l’accord du beau-parent. Si un beau-parent souhaite donner un bien à l’enfant de son conjoint sur ses biens propres, les frais seront de 60 % (le donateur et le donataire étant étrangers l’un pour l’autre au sens de la loi).
La clause bénéficiaire en assurance vie
Le conjoint peut aussi transmettre un capital à son beau-fils ou à sa belle-fille en l’inscrivant comme bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie dans des conditions fiscales avantageuses.
À son décès, le bénéficiaire pourra recevoir jusqu’à 152 500 € sans tenir compte de l’ordre successoral, et sans droits à payer si les primes ont été versées avant ses 70 ans.
Attention, le montant versé ne doit pas être exagéré comparé aux ressources des époux et ne doit pas léser les héritiers légaux, qui peuvent contester pour les réintégrer dans la succession.
Le legs
Enfin, si vous souhaitez favoriser les enfants les plus jeunes ou ceux d’une deuxième union, vous pouvez léguer, via un testament, la quotité disponible de votre patrimoine.
Quel que soit votre projet, il est vivement recommandé de prendre attache avec un notaire pour étudier votre patrimoine et envisager la meilleure stratégie en vue d’une succession sereine.
(Crédit photo : iStock / Letizia Le Fur)