C’est pour venir en aide au Cardinal Mazarin et tenter d’apurer la dette publique de la France que Lorenzo Tonti propose au roi Louis XIV une nouvelle gestion de l’argent public : un système d’épargne collective, formalisé par l’association des divers épargnants.
Nous sommes en 1653 et la « tontine royale » est née.
Depuis, la tontine s’est principalement répandue dans les pays non industrialisés où elle sert une économie parallèle et non officielle. C’est ainsi qu’en Afrique et en Asie, l’adhésion à ce système informel est en progression constante. Dans les pays dits “développés”, dont la France, le système des tontines est géré d’une façon légale et clairement définie. Explications.
La tontine, comment ça marche ?
Depuis sa création, le principe a peu évolué et la tontine reste une association d’épargnants qui investissent leur argent dans un « pot commun » pendant la durée de vie de la tontine, soit entre 10 et 20 ou 25 ans ou signent un contrat avec une clause de tontine pour acquérir un bien, mobilier ou immobilier.
Tout l’intérêt d’appartenir à une tontine semble financier, mais c’est une aussi une démarche qui se veut rassurante : protéger les concubins en leur donnant l’assurance qu’au décès de l’un, c’est l’autre qui est (d’office) propriétaire du bien immobilier objet de la tontine, ou créer une épargne à long terme pour former un capital vieillesse et mettre en sécurité le dernier survivant d’un couple.
Le système des tontines suscite donc l’intérêt d’un public averti, dans une finalité commune d’épargne ou de sécurisation d’un patrimoine immobilier ou mobilier. Dans cette situation, la tontine devient un système “underground” qui affiche une vie parallèle au système d’épargne habituel (banque, organisme de crédit, etc.).
Le système de la tontine est encore mal connu et ces quelques informations peuvent vous aider à en appréhender les particularités et à en tirer le meilleur profit.
La tontine pour conserver un bien immobilier
C’est la clause de tontine (clause d’accroissement), insérée dans un contrat de vente/achat d’un bien immobilier qui formalise l’achat en tontine, ce qui revient en fait, à acheter à plusieurs. La pleine propriété du bien acquis de cette façon revient au dernier survivant de l’association, après le décès de tous les autres membres de la tontine.
Légalement, le dernier survivant est vu comme l’unique propriétaire du bien, soustrayant ainsi sa valeur (en euros) de la succession et des règles de la réserve héréditaire (partie de l’héritage réservée aux héritiers prioritaires). Cela permet la transmission dudit bien à un conjoint “non officiel” aux yeux de la loi, dans la mesure où ce dernier est aussi un adhérent de la tontine.
Important : la tontine doit légalement montrer son caractère aléatoire. Pour cela, lors d’un investissement immobilier (achat), la clause de tontine est souscrite entre adhérents dont l’espérance de vie semble similaire (âge et état de santé). Le survivant ne peut donc pas être connu à l’avance et la tontine dissimuler une donation.
La tontine pour placer une somme d’argent : le placement tontinier
A l’heure actuelle, le placement tontinier est rémunérateur au-delà de tout autre placement, y compris l’assurance vie et le Plan d’Epargne en Actions (PEA).
Un capital (en euros) est constitué par l’ensemble des adhérents, chacun effectuant un versement unique ou des versements périodiques (mois ou année). Selon l’article L.322-26-4 du Code des Assurances, la gestion de ce capital est confiée à des “sociétés d’assurance mutuelles” qui regroupent tous les adhérents en associations. A l’expiration de ces dernières, le capital augmenté après placement est réparti entre les survivants de la tontine, montrant régulièrement un rendement à terme supérieur à 4,5%, hors frais inscrits dans les statuts (gestion).
Le capital est inaccessible pendant toute la durée de vie de la tontine et des associations. Mais ce qui apparaît comme un blocage aux yeux des participants, montre aussi certains avantages.
Important : si le décès d’un adhérent est constaté, son capital reste acquis à la tontine et ne sera pas reversé aux héritiers. Pour éviter cela, l’adhérent peut contracter une assurance décès et désigner un bénéficiaire en cas de décès.
La fiscalité de la tontine
Dans le cadre d’un achat immobilier en tontine, c’est la fiscalité qui se rapporte au contrat aléatoire que les services fiscaux vont appliquer. L’achat concerné n’est pas soumis aux droits de succession mais aux droits de mutation à titre onéreux, le montant de ces derniers étant nettement moins élevé, soit environ 6% pour un concubin, contre 60% pour les droits de succession.
Du point de vue de la fiscalité :
- le capital tant qu’il est indisponible et ne montre aucune valeur de rachat est déductible de votre assiette d’IFI,
- les droits de succession peuvent être nuls dans le cas où la clause de tontine appartient aux statuts d’une SCI, cette dernière étant propriétaire du bien,
- les plus-values sont taxées selon la même base que les assurances vie, soit 7,5% après abattements plus prélèvements sociaux.
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